J’aurais très bien pu appeler les stages que je propose « rééducation intensive ». Ce terme est connu des parents, et très utilisé pour différentes formes de thérapies (Qu’il s’agisse de stages habit ile ou DMI ou thérapie conductive, ils emploient tous le terme de stage de rééducation intensive). Mais j’ai préféré choisir et conserver le terme de « séjours thérapeutiques », allant à contre courant, quitte à ce que cela joue en la dé faveur du référencement de mon site internet et de ma visibilité en ligne. Je vous explique dans cet article toute la philosophie du soin qui se cache derrière ce choix des mots. Elle implique une vision de la santé qui inclut toute les dimensions de l’enfant, même lorsqu’il s’agit de servir « uniquement » des objectifs fonctionnels.
De la rééducation intensive aux séjours thérapeutiques : pour une approche de santé intégrative
Les stages de rééducation intensive recommandées par les rapports de l’HAS de 2021
Avant de vous expliquer la spécificité de mes séjours, revenons au stage de rééducation intensive. Selon les dernières recommandations de l’HAS concernant la rééducation de l’enfant atteint de paralysie cérébrale, ces stages paraissent pertinents pour soutenir les différents objectifs de rééducation de l’enfant, quand ils sont proposés en complément des soins hebdomadaires. Les rapports de l’HAS se réfèrent notamment aux dernières études réalisées sur les stages habit ile qui ont montré des résultats probants.
Il ressort de ces dernières études différentes orientations générales dont celle-ci :
– des stages de deux fois cinq journées consécutives, avec des objectifs de rééducation personnalisés et ciblés (il est préférable de choisir un ou deux objectifs prioritaires plutôt que de travailler sur tous les plans en même temps)
– ces études ont étés réalisées sur des stages de 5h par jour, qui incluent le temps du repas du midi.
– il est recommandé de respecter l’accord de l’enfant pour toutes les techniques / pratiques utilisées. La rééducation ludique devient un principe fondamentale.
– le travail sur tâche orientée sont recommandées. Par exemple, pour améliorer la marche, il faut marcher. Que ce soit sur un tapis de marche, ou avec une aide de marche, ou entre des barres parallèles.
– le renforcement musculaire paraît un aspect très important de la rééducation fonctionnelle.
De stage de rééducation intensive au choix de « séjour thérapeutique »
Tout ce que je vais vous partager par la suite ne se veut pas du tout en opposition aux recommandations actuelles, au contraire, car j’inclu dans mon approche toutes les données actuelles de la science. Par contre, de part mon expérience professionnelle et ma sensibilité propre, j’ai trouvé que ces pratiques étaient parfois limitées pour certains patients, ou à certaines périodes du développement de l’enfant. La phase des 2 ans fait partie de cette période par exemple, cette fameuse période où l’enfant aura tendance à s’opposer à tout de façon systématique. Nos pratiques kinés en cabinet libéral sont aussi parfois limitées auprès de certains enfants qui cumulent des symptômes moteurs et comportementaux (TSA / TDAH).
Ainsi, dans mon ancienne pratique de kiné libérale « classique », je me suis retrouvée face à un sentiment de frustration, car j’avais l’impression de ne faire que la moitié de ce que je souhaitais apporter à mes patients. Les enfants auprès desquels je travaillais arrivaient toujours très contents, nous passions de bons moments en séance. Mais me limiter à cette prise en charge en cabinet me donnait l’impression de focaliser avec l’enfant sur « ses symptômes », ou « les faiblesses de son corps ». Alors que ces enfants avaient aussi pleins de qualité et de compétences, que je ne pouvais pas mettre en valeur en 30 min de séance, puisqu’il fallait bien s’occuper de « ce qu’il y avait à améliorer ».
Ces petits enfants atteint de paralysie cérébrale ou syndrome génétique font beaucoup d’efforts au quotidien pour ce que nous avons acquis comme automatique : manger / se déplacer / apprendre / rester assis. TOUT demande plus d’attention, de persévérance, de patiente. Mais vous le savez déjà, vous le vivez au quotidien auprès de vos enfants. Nombreux d’entre eux sont ceux qui vivent un seuil de frustration assez élevé. Et en 30 min de séance, nous appuyons souvent directement sur cette frustration. Tu ne sais pas tenir un objet, et bien tiens le. Tu ne sais pas marcher sur le côté, et bien on le fait. Nous passons du temps à mettre l’enfant face à ce qu’il ne sait pas encore faire, en lui demandant de faire des efforts TOUT LE TEMPS.
Ceci n’est pas un problème en soi, car ces séance hebdomadaires sont nécessaires et très bénéfiques pour ces enfants. Mais j’avais envie de contribuer à une rééducation qui mette aussi l’accent sur leurs compétences, leurs qualités, leur plaisir de jouer et d’habiter leur corps sans qu’il n’y en permanence une attention mentale sur : « tu dois faire mieux ». Une attention mentale que je préserve moi en tant que thérapeute, mais que j’essaie au mieux de ne pas transférer à l’enfant.
La spécificité des séjours thérapeutiques : une rééducation pédiatrique spécialisée dans un environnement particulier
Au cours d’un séjour thérapeutique, nous faisons de la kinésithérapie pédiatrique spécialisée en cabinet. Mais ce cabinet est immergé dans le cadre de la ferme équestre. Il est entouré du jardin avec ses fleurs, ses fruits rouges, ses parcours de motricité. Nous pouvons rendre visite aux animaux le temps d’une pause, ou aller jouer au lavoir, ou faire des « exercices kinés » au contacte des animaux… Les possibilités sont infinies et ajustée à chaque enfant. Pour ceux qui ne tiennent pas debout et qui ont moins d’autonomie dehors, j’utilise beaucoup la musique. TOUT L’ENVIRONNEMENTT EST CREE POUR FAIRE OUBLIER A L’ENFANT QU’IL TRAVAILLE, il est juste là pour jouer.
C’est ainsi que T… atteint d’une hémiparésie a développé son endurance en marchant dans des pentes pour aller nourrir les animaux.
Ou que A…. a amélioré son équilibre avec les parcours pour aller cueillir les framboises,
Ou que C… qui avait un synd génétique et des troubles de l’oralité à goûté ses premières fraises rouges à force de passer devant tous les jours.
Ou que L… a accepté de marcher en terrain varié et a retrouvé plus d’autonomie à la marche chez elle grâce aux animaux,
ou que A… a trouvé toutes les ressources nécessaires pour faire 3h de kiné en individuel par jour de façon très concentrée malgré son TDAH, avec une très belle évolution fonctionnelle grâce à l’alternance des temps dehors et dedans.
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C’est aussi un enfant sur deux dont les parents me disent plusieurs mois après le séjour : « il est très apaisé depuis ». Un apaisement qui n’a rien de négligeable, puisque au delà de faciliter le confort au quotidien pour toute la famille, permet un travail fonctionnel plus précis et intense lors des suivis hebdomadaires.
L’environnement fait parti intégrante du soin, pour l’enfant et sa famille. Les frères et sœurs peuvent être présents pendant les soins, ou profiter du cadre du village et de la présence des animaux. Tout le monde passe un bon moment, avec le plaisir de profiter de la magie de nos montagnes Ariégeoises.
N’allez pas croire que je néglige les objectifs fonctionnels : ils sont ma priorité. Mais je les resitue dans leur contexte car pour moi, mieux bouger n’est pas un objectif en soi. Si je souhaite aider ces enfants à mieux bouger, c’est avant tout pour contribuer à leur bonheur.
N’allez pas croire que je néglige également la dimension technique de mes soins : je me suis formée plus de 10 ans en continue uniquement sur ces dimensions techniques. C’est à nouveau qu’elle n’est pas pour moi une finalité en soi, mais qu’elle devient encore plus pertinente lorsqu’elle est associée aux dimensions humaines du soin.
Les séjours thérapeutiques : pour soutenir la joie et le plaisir de l’enfant qui deviennent les moteurs premier de son développement.
Je tiens encore une fois à préciser que je ne critique en rien les autres propositions de stage de rééducation intensive, et que je les juge même très pertinentes. Je pense seulement qu’il était nécessaire de proposer d’autres alternatives complémentaires de ce qui existe déjà, pour montrer qu’il est possible de préserver l’efficacité de la rééducation dans un contexte qui mette l’accent sur le plaisir de vivre, et pas seulement sur la maladie. Car ces patients restent des enfants avant d’être des patients, qui cherchent à découvrir le monde et leur corps avec légèreté, curiosité et joie, et pas seulement grâce au « courage et à la volonté ».
L’efficacité des soins de rééducation peut être préservée quand l’environnement est là pour soutenir l’éveil à la joie. Et c’est dans la continuité de cette philosophie que je propose des séances d’hippothérapie et de médiation animale dans mes séjours thérapeutiques.
Pour en découvrir plus sur les différents contenus thérapeutiques de mes séjours, je vous invite à parcourir les autres articles que j’ai écris, disponibles dans l’onglet « ressources », parmi lesquels :
Equithérapie, Hippothérapie, Médiation animale : les différences – Le Prisme Corporel
Méthode Feldenkrais et Kinésithérapie pédiatrique – Le Prisme Corporel